Le ministère de l’Energie évoque un « non-besoin » d’une vingtaine de réacteurs .
Pour la première fois hier, le ministère de l’Energie a évoqué la possibilité de ne pas avoir « besoin » de tous les réacteurs nucléaires à l’horizon 2025. Par rapport au parc actuel des 58 réacteurs, qui totalisent une puissance de 63,1 gigawatts (GW), « on arrive à une fourchette entre 36 et 43 GW nécessaires dans l’hypothèse (d’une baisse de la part du nucléaire dans la production électrique de 75 % à) 50 % vers 2025 », a indiqué Laurent Michel, directeur général de l’énergie et du climat (DGEC) au ministère de l’Energie. « Ce qui veut dire qu’en termes de « non-besoin », c’est une vingtaine de réacteurs » en moins, a-t-il précisé lors de son audition à l’Assemblée nationale par la commission d’enquête sur le nucléaire.
La position du ministère, qui s’appuie notamment sur l’hypothèse d’une évolution de la demande électrique « relativement modérée », diffère largement de celle défendue par EDF. Selon son PDG, Henri Proglio, les effets de la croissance du PIB, de l’évolution de la démographie et des transferts d’usage (développement des véhicules électriques par exemple) pourraient suffire à faire baisser mécaniquement la part du nucléaire à 50 % de la production électrique à l’horizon 2025, sans avoir besoin de fermer de réacteurs nucléaires.
Sécurité d’approvisionnement
D’autres facteurs que l’offre et la demande d’électricité interviendront toutefois pour établir les choix du mix énergétique, estime le ministère de l’Energie, parmi lesquels la sécurité d’approvisionnement et les marges de sécurité à prendre, les enjeux de calendrier ou la compétitivité des moyens de production.
Sur le plan économique, le ministère de l’Energie a d’ailleurs indiqué que les investissements prévus pour prolonger le parc nucléaire restaient plus compétitifs que les autres moyens de production. Alors qu’EDF table sur 55 milliards d’euros de dépenses, même « si on doublait l’investissement, on rajouterait 10 euros donc on resterait dans les 50-60 [euros du mégawattheure, NDLR], loin de l’univers des 80-100 que coûterait tout nouveau mix », a indiqué le directeur de l’Energie, Pierre-Marie Abadie.
Pour autant, ont jugé les hauts fonctionnaires du ministère, EDF doit se poser la question de la séquence et de l’opportunité de ses dépenses. Estimant qu’un « grand nombre d’investissements ne s’amortissent bien que sur vingt à trente ans », Laurent Michel s’est interrogé sur l’opportunité d’ « arrêter certains [réacteurs, NDLR] à trente »ans pour éviter des dépenses et les centrer sur d’autres réacteurs. « Il y aura une question », a-t-il estimé.
La semaine dernière, le ministère de l’Energie a présenté au Conseil national de la transition énergétique des documents préparatoires au projet de loi de transition énergétique qui doit être adopté en juin en Conseil des ministres. En termes de méthode, la définition d’une « stratégie bas carbone » et d’une « programmation pluriannuelle de l’énergie » fixeront les trajectoires, alors que la loi elle-même fournira les objectifs de long terme ainsi que les outils de gouvernance et de pilotage.
Écrit par Véronique Le Billon
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