[S·EAU·S 2/16] Les inondations et le retrait-gonflement des argiles (RGA)
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Tirer les leçons d’Alex
et de la cité Notre-Dame des marins !

Une crue dévastatrice, un immeuble évacué en pleine nuit : 2 manifestations du trop d’eau et du manque d’eau. Comment faire face à la multiplication des catastrophes naturelles pour lesquelles notre système assurantiel n’est plus suffisamment dimensionné ?

Contexte

Le risque inondations

La totalité de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur est soumise au risque inondation. Dans les départements alpins ou aux reliefs très marqués se manifestent des inondations torrentielles, caractérisées par leur soudaineté ; dans les départements moins montagneux les inondations de plaine sont plus lentes ; dans les départements littoraux se mettent en place les submersions marines que ce soit sous forme de tempêtes ou de tsunamis. Par ailleurs, la problématique de la gestion des digues est très importante en région Provence-Alpes-Côte d’Azur.

L’ampleur des inondations va dépendre de l’intensité et la durée des précipitations, la surface et la pente du bassin versant, la couverture végétale et la capacité d’absorption du sol, la présence d’obstacles à la circulation des eaux.

Plusieurs études récentes confirment, à l’échelle de l’arc méditerranéen français, une tendance à la hausse de l’intensité des phénomènes depuis les années 60 (+22 % avec une fourchette d’incertitude importante  comprise entre 7 et 39 %), avec un doublement de la fréquence des épisodes intenses dépassant le seuil de 200 mm de pluie par jour, associé à une augmentation des surfaces touchées. Ces tendances sont liées au changement climatique et plus particulièrement à la hausse des températures. 

Ainsi, depuis une dizaine d’années, au début de l’automne, la température de la Méditerranée atteint souvent, au large de Marseille et de Nice, de 22 à 25 °C. Or les cyclones peuvent se former à partir de 26 °C. De plus, la Méditerranée étant une mer fermée, on trouve une forte humidité en altitude liée à l’évaporation, d’où la violence de plus en plus marquée des orages. Les projections scientifiques montrent que ces épisodes dits cévenols vont, d’ici la fin du XXIe siècle, être plus fréquents et plus intenses. 

Se souvenir d’Alex

En octobre 2020, 650 millions de tonnes d‘eau sont tombées sur le Mercantour avant de redescendre vers la mer, soit l’équivalent de plusieurs mois de précipitations en quelques heures. Ce type de phénomène se produirait selon Météo France entre 3 et 6 fois par an (entre janvier et avril 2024, il y a déjà eu 7 épisodes méditerranéens en France, un record). Cela s’est traduit par une intensité unique du débit de la Tinée à raison de 940 m3 d’eau par seconde, soit le débit moyen annuel de la Loire à son exutoire, Saint-Nazaire. 

Le bilan est lourd : 4 morts, une vingtaine de disparus, des maisons englouties, 9 ponts effondrés, des routes coupées et impraticables durant plusieurs mois, plus d’électricité ni d’eau potable.

La rivière s’est étendue jusqu’à 200 mètres, en détruisant toutes les maisons sur ses bords. 420 maisons ont été  impactées, 180 détruites, des infrastructures détruites pour une valeur de 780 millions d’€. 

De nombreuses rivières régionales sont susceptibles de créer des inondations.

Sur les 7 362 reconnaissances de catastrophes naturelles, 4 184 concernent les inondations terrestres.
Citons, la basse vallée de la Siagne (Riou de l’Argentière), à Mandelieu, où des maisons, inondées plusieurs fois, commencent à s’effondrer. Citons encore la Clarée. Son lit est perché par rapport à la plaine suite aux curages de 1955 et 1957 avec comme conséquence des habitations inondées alors que la zone humide reste hors d’eau. Les débordements en amont de la Passerelle de Fort-Ville sont relativement fréquents.


Au-delà des destructions, notons la défiguration des paysages car des murs de soutènement sont construits du fait des ruissellements et glissements de terrains liés à une urbanisations inadaptée. Il faut aussi prendre en compte la souffrance des personnes qui devront, si elles le souhaitent, quitter leur logement.

Le risque dû à la sécheresse : gonflement-retrait des argiles

Le retrait-gonflement des argiles est lié aux variations de teneur en eau des terrains argileux : ils gonflent avec l’humidité et se rétractent avec la sécheresse. 

Depuis le 1er octobre 2020, pour les projets situés en zone exposée à un niveau fort ou moyen, la réalisation d’études géotechniques de type G1 (étude préalable) ou G2 (étude de conception au stade avant-projet ou projet), est obligatoire dès la conclusion d’un contrat de vente d’un terrain ou de travaux de construction.

Face à l’explosion annoncée des sinistres sur les maisons individuelles en raison du changement climatique, en 2022, la Cour des comptes préconise plus de prévention et de contrôle car la prise en compte de ce phénomène par le régime Cat Nat ne lui paraît pas soutenable. En effet, entre 1982 et 2020, ce phénomène a représenté 40 % des coûts liés au régime “CatNat” qui indemnise les dégâts liés aux catastrophes naturelles. France Assureurs, la fédération professionnelle du secteur, a ainsi estimé que les sécheresses coûteront environ 43 milliards d’euros sur la période 2020-2050. Ce chiffre représente trois fois le coût enregistré au cours des trente années précédentes. Le coût-record pour les assureurs est de 3,5 milliards d’euros pour l’année 2022.

Sur la carte : part des maisons individuelles exposées au risque de retrait-gonflement des argiles Provence-Alpes-Côte d’Azur est très exposée, le département des Bouches-du-Rhône est le plus fortement impacté : 226 arrêtés interministériels, y ont été pris entre 1989 et 2014. 

Se souvenir de Notre dame des marins à Martigues

En septembre 2023, 150 personnes ont été évacuées en milieu de nuit à cause d’une fissure qui a cisaillé un immeuble en deux à Notre-Dame des Marins, une grande cité de Martigues. Les deux bâtiments évacués seront démolis, car jugés irréparables.

Les habitants ont dû attendre un mois avant de pouvoir récupérer leurs affaires et déménager. Certains ont accepté des relogements à Marseille, d’autres sont toujours à l’hôtel en attendant une proposition qui leur convienne.

On peut également noter que la sécheresse récurrente peut avoir des conséquences sur les incendies, autre risque naturel. Déjà les pompiers doivent prévoir des réserves d’eau près des massifs forestiers.

Nos propositions

  1. Informer très largement la population qui sera de plus en plus affectée par ces évènements. Le  document d’information communal sur les risque majeurs (DICRIM) reste souvent dans les communes.
  2. Choisir la prévention, en respectant la réglementation, sans dérogation : aucune construction dans les zones inondables et des études géotechniques pour tous travaux dans les zones de retrait-gonflement des argiles.
  3. Ne pas dégrader ou artificialiser les cours d’eau et bassins versants pour permettre une meilleure infiltration de l’eau
  4. Augmenter une nouvelle fois les délais pour faire connaître les RGA, voire impliquer les compagnies d’assurance dans l’information de leurs clients
  5. Mettre en place un accompagnement satisfaisant des personnes touchées afin qu’elles puissent faire le choix d’un départ ou de travaux d’adaptation de leurs habitations.

Sources & ressources