[S·EAU·S 3/16] Eau et pollutions urbaines et industrielles
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Garantir la qualité de l’eau !

Indispensable à la vie, l’eau véhicule pourtant aussi les déchets, les pollutions. Nous devons agir sur les systèmes de collecte des déchets et d’assainissement des eaux, et sur les pollutions dites accidentelles. Quelles sont les armes techniques et juridiques à déployer?

Contexte

L’eau sanitaire, l’eau des rivières, l’eau d’infiltration, les nappes souterraines, la mer sont autant d’exutoires que les filtres naturels ou artificiels ne suffisent à épurer… même en l’absence d’accidents industriels.

Plusieurs cas illustrent l’ampleur des actions à mener pour sécuriser l’approvisionnement en eau potable, assurer une irrigation saine, garantir l’état sanitaire des eaux de baignade et ne pas empoisonner le milieu halieutique.

Eaux pluviales et eaux usées

Dans une région où les 37 millions de touristes annuels, équivalents à plus de 2 millions d’habitants permanents, se traduisent par un décuplement de la population de certaines communes, les systèmes de collecte des déchets et d’assainissement des eaux sont rarement suffisants pour garantir des rejets conformes aux normes sanitaires.

Sauf à surdimensionner à outrance les équipements, les solutions résident dans la sobriété : moins de déchets, moins d’eau utilisée à laquelle incitent déjà certains établissements hôteliers, les élu.es au travers de la régulation des flux touristiques.

Les eaux pluviales véhiculent nombre de déchets et de polluants, y compris d’hydrocarbures surtout lors des premières pluies. Quand les eaux pluviales sont mélangées aux eaux usées, comme dans le centre de Marseille où il n’y a pas de réseaux de collecte séparatifs, les stations d’épuration ne suffisent plus en période de forte pluie, et les ‘by-pass’ à la mer provoquent périodiquement la pollution et la fermeture de plages pendant plusieurs jours.

Plus grave encore, ce sont les dérogations dont bénéficient quelques entreprises pour rejeter dans le milieu naturel des produits toxiques, telle l’usine de pâte à papier de Tarascon qui, comble du scandale, profite d’importantes réductions de sa redevance à l’Agence de l’eau.

Eaux souterraines

Les nappes souterraines recueillent, par infiltration, les eaux d’écoulement tant en milieu urbain que rural.

En milieu rural, c’est surtout l’usage d’engrais et de pesticides, parfois même interdits, qui rend les eaux impropres au pompage et nocive pour l’environnement.

En Camargue, la poursuite de l’utilisation du bentazone, désormais prohibé, empêche de renvoyer l’eau des rizicultures concernées vers l’étang de Vaccarès dont la salinité croissante modifie le fragile écosystème de cette vaste zone humide. En 2024, une autorisation a été donné par le ministre de l’agriculture pour l’utilisation de l’AVANZA pour 120 jours par les riziculteurs de Camargue, produit  très toxique pour les milieux aquatiques.

Pour combattre ce type de pollution, c’est l’arme juridique, étayée par des mesures, qui est utilisée par des associations telles que France Nature Environnement. L’exemple de la carrière de Mazaugues (Var) montre que la situation n’est jamais gagnée : l’arrêt des travaux avait été prononcé en 2023, mais ils vont recommencer avec un risque de colmatage de la nappe phréatique.

En milieu urbain, ce sont les effluents domestiques ou industriels qui dégradent la qualité des sols et des eaux souterraines.

Une industrie pharmaceutique pollue le fleuve côtier La Caravelle avant qu’il ne devienne Les Aygalades sur Marseille.

Dans le Var, à Fontsante, au dessus du lac de Saint-Cassien qui alimente en eau potable plusieurs communes dont celles de Cannes, il est proposé de créer  une usine de tri, de traitement et de stockage de déchets industriels et du BTP comportant des produits dangereux comme l’amiante, les mâchefers, les boues issues du dragage des ports. 200 000 tonnes resteraient entreposés sur site. Réaliser ce projet, c’est occulter les risques de pollution et donc d’atteinte par écoulement direct des eaux pluviales ou par infiltration à l’alimentation en eau potable de 200 000 personnes.

Un durcissement des contrôles, voire de la réglementation, dont la suppression de toute dérogation est nécessaire ; sans omettre un renforcement des contraintes aux implantations industrielles à proximité des zones humides en appliquant le principe de précaution.

Des travaux doivent également être entrepris pour mieux protéger les eaux potables, notamment dans les Bouches du Rhône au niveau du lac-réservoir du Réaltor où transite le Canal de Marseille mais où convergent aussi les eaux pluviales polluées de la zone commerciale de Plan-de-Campagne.

La pollution chimique, surtout métallique, rémanente, se stocke dans les sédiments et conduit immanquablement à la mort de la rivière.

Pollutions accidentelles

Des accidents, surtout d’origine industrielle, peuvent polluer durablement les terres, nappes, cours et étendues d’eau. En 2009, la rupture d’un pipeline d’hydrocarbure a affecté durablement une partie de la plaine de Crau. En 2013, stoppée depuis, une fuite de chrome hexavalent d’une usine de traitement de métaux pour l’aéronautique affecte encore aujourd’hui les eaux souterraines des quartiers nord de Marseille. En 2020, une usine chimique suite à la rupture d’une cuve de chlorure ferrique, n’a pu contenir le produit qui s’est déversé en Méditerranée par le chenal de Caronte.

Outre les contrôles, les lourdes condamnations poussent les entreprises concernées à une plus grande prise de conscience environnementale. Le Chantier naval de Marseille, que France Nature Environnement Bouches-du-Rhône a fait condamner en 2020, s’équipe actuellement pour ne plus rejeter en mer, les eaux non traitées de carénage des navires.

La gestion, tant quantitative que qualitative, des eaux mérite une attention accrue de l’ensemble des parties prenantes, depuis les lanceurs d’alerte jusqu’aux instances de gouvernance.

Nos propositions

  • Appel à la sobriété dans tous les usages de l’eau : voirie, habitat, industries … ;
  • Formations des personnels ;
  • Distribution de kits : mousseurs, poches d’eau pour WC … ;
  • Protection systématique des captages d’eau potable ;
  • Durcissement des contrôles, par la DREAL, des industries, dont spécifiquement les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) : mettre fin réglementairement au régime de la simple déclaration en matière d’ICPE ;
  • Exécution provisoire des jugements en matière d’atteinte à l’environnement ; l’appel n’est alors plus suspensif ; consignations importantes pour réparation du préjudice ;
  • Arrêt de toutes les dérogations accordées aux lois et règlements sur l’environnement ainsi que des rabais ou exonérations des redevances dues à l’Agence de l’eau ;
  • Extension des stations d’épuration au traitement des microplastiques et micropolluants avec couplage à des unités de méthanisation.