Fukushima, le carnet de voyage d’Olivier Florens
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Après avoir expliqué ici les raisons de son voyage à Fukushima, Olivier Florens, Conseiller général EELV du Vaucluse raconte ses  ses premières journées au Japon :

• Dimanche 11 mars,

« Avec Laurent Théron, compagnon faucheur volontaire, nous décidons comme prévu, de nous rendre au plus près de la centrale avant de rejoindre le grand rassemblement à Kouryama dans la préfecture de Fukushima.

7H45 : Au départ du parking de l’hôtel le taux de radioactivité est de 0,16 mcsivert (1) Nous empruntons une route de montagne enneigée en direction de la centrale de Fukushima-Daïchi. Nous décidons alors de relever grâce au radex des mesures de radioactivité :

8h40 : 0, 72 mcsivert/ heure : prélèvements effectués sur un parking à 54km de la zone interdite (elle même située à 20km de la centrale). Beaucoup de neige, des rizières à l’abandon, des cultures en friches et des villages désertés.

9h22 : 54 km de la centrale :  la mesure dans l’air est de 1,28 mcSv,  au sol de 4,50 mSv/h.

10h15 : Nous arrivons au barrage à 30 km de la Centrale de Fukushima-Daichi. Nous sommes arrêtés par la police :

Sans passe spécial nous ne pourrons aller plus loin. Nous les informons  du taux de plus de 2,57 mcSv/h. Devant ce chiffre élevé ils nous avouent effectuer des rotations très rapides pour éviter une exposition prolongée. Nous reprenons notre chemin et, à plus 54 km de la centrale nous nous arrêtons dans  une ferme abandonnée pour constater un taux record de plus de 9,90 mcSv/h.

11H45 : Arrivée à  Kouriyama pour la grande manifestation commémorative : mesure effectuée au sol : 2,45mcSv/h., mesure dans l’air : 1 mcSv/h la manifestation débute à 12h00 avec les discours officiels.

Des japonais de toutes les provinces se sont mobilisés (syndicats, associations, étudiants, vieux, jeunes). beaucoup de sourires et  de colère aussi :

De la  colère contre l’électricien Tepco et le gouvernement et la joie de se retrouver là solidaires, unis et si nombreux. Malgré le froid et la radioactivité de 2, 54mSv au sol, ce sont plus de 25 000 manifestants déterminés qui ont défilés dans les rue de Kouryama, munis d’étendards colorés. Partout nous recevons un accueil chaleureux de la part de nos amis japonais, touchés par notre solidarité. »

• Samedi 10 Mars

« Aujourd’hui nous avons été reçus par le syndicat Nomiren, qui est en fait l’équivalent de la confédération paysanne.

Autour d’un repas typiquement japonais, nous avons pu aborder les problématiques des paysans japonais, qui comme par hasard, mondialisation oblige, sont sensiblement les mêmes qu’en France.

Perte des terres agricoles, perte de l’autonomie alimentaire, vieillissements des paysans, des coûts de plus en plus chers, et… des OGM !!! Il y a une demande de leur part de créer du lien, car comme nous commençons à le constater, Un début de mouvement social citoyen qui commence à émerger.

Ensuite ils nous ont amené dans leur laboratoire. Ce laboratoire a été autofinancé au départ par les agriculteurs et des associations de consommateurs. Au début, il devait analyser la teneur en pesticides des aliments, ce qui a eu pour effet de faire reculer l’utilisation des pesticides, et même de faire reculer les positions du gouvernement sur ces mêmes  pesticides.

Ils nous racontaient qu’au vu du poids qu’ils représentaient avec les associations de consommateurs, le gouvernement n’avait pas trop d’alternatives. (Exemple à suivre ???)

Ensuite le labo s’est modernisé avec l’apparition des OGM, ils se sont mis à analyser les OGM dans les aliments. Il faut savoir que la législation ici autorise les OGM, mais le seul champ qui a été cultivé avec des OGM a été fauché par les paysans eux-mêmes car ils sont farouchement opposés à cette technologie. (encore un exemple à suivre ???). Ils analysent les OGM dans les aliments car les importations de soja OGM envoyé par les « amis américains » sont grandissantes.

Et là, aujourd’hui, le pire qui pouvait arrivé est arrivé : la radioactivité. Ce fléau qui se répand d’une manière invisible, celui qui se diffuse à des centaines de kilomètres d’une centrale comme c’est le cas ici puisqu’ils ont découvert des agrumes radioactifs à plus de 600 kilomètres de la centrale, un fléau invisible, inodore, nocif, et présent de partout !

Ici tout le monde ne sait pas ce que la radiation interne peut provoquer. Tous le monde n’a pas lu le rapport du professeur Bandavjeski, et les autorités ne veulent pas le reconnaitre, d’ailleurs quelle nation nucléarisée oserait prétendre qu’un accident nucléaire détruit des vies à jamais comme ici ? Comment expliquer à une nation qu’après un accident nucléaire, vous continuez à alimenter et donc à contaminer vos propres enfants avec un poison invisible et mortel ?! Comment expliquer à une nation qu’après un accident nucléaire, la terre sur laquelle vous avez grandi, travaillé, aimé, est perdue à jamais, que vous êtes obligés de laisser jusqu’aux photos de votre vie car elles sont radioactives ?

Ici des paysans se suicident ! Que faire lorsqu’on a tout perdu ? Ici, les banquiers expliquent à ceux qui ont tout perdu qu’ils doivent continuer à payer le crédit de la maison qu’ont été contraints d’abandonner pour aller vivre dans un gymnase !

MAIS DANS QUEL MONDE VIVONS-NOUS ?

Quand je pense que nos dirigeants nous racontent tranquillement que pour notre sécurité on met des radars ! Que feront ils si un jour cela nous arrive, que feront-ils donc ?

Aujourd’hui à Tokyo, au pied d’un arbre dans une rue, 1200 becquerel (césium 234 et 237)… Combien dans les cours d’école ? Combien dans les aliments, l’eau, le pain, le fruit, l’air, le miel, le lit dans lequel ils vont dormir ? Quelle leçon de courage !

On finira par un dicton Japonais pour aujourd’hui : “Le moustique ne pique que le visage dont les yeux pleurent.”
Bien à vous »

 

• Vendredi 9 mars

« Hier,  j’ai rencontré les mères de Fukushima qui campent, elles ne savaient pas qu’en France nous allions faire la même chose. elles en sont ravies, elles ont vraiment besoin de soutien.  si vous pouviez faire suivre et envoyer des mails de soutien à cette adresse : masakiyotaichi@kem.biglobe.ne.jp, ce serait très bien pour elles. aujourd’hui nous avons effectué des mesures dans les rues de Tokyo au pieds des arbres car il pleut 1000 béquerels (césium 234 237).
Bien à vous et merci encore pour elles. »

(1) : Vous voulez en savoir plus sur les mesures de la radioactivité : téléchargez ce document de l’Autorité de sureté nucléaire

2 réflexions au sujet de “Fukushima, le carnet de voyage d’Olivier Florens

  1. Bonjour, et bon courage …

    Nous te suivons à la trace avec Denise POUSSEL et les compagnons de MEDIANE.
    En tant que correspondant du Pertuisien en ligne, j’ai effectué un reportage-photos de la journée du dimanche 11 mars au Pontet-Avignon; J’ai glissé quelques lignes sur ton voyage au Japon :
    ;

    Très amicalement,
    Gilbert de Pertuis, Porte du Luberon
    Cadre Honoraire SNCF

  2. Salut les boy s ! des nouvelles du front un peu, beaucoup de chose a raconter mais surtout une journee de dingue pour la comemoration de la catastrophe…On a ete a koriyama qui est a 60 k de la centrale nucleaire avec Yasmine (une fille qui a du quitter sa maison tres rapidement apres la catastrophe, elle vient juste de rentrer au japon et je l aide a se reinstaller), donc on a ete a une manifestation anti nucleaire et comemorative, il y avait des milliers de personnes et peu de journalistes mais on a remarque une equipe de tv francaise avec qui on a pu discuter, je me suis cru dans un reportage d investigation canal plus (je vais peux etre passer a la tv yyaaoouu). C est un elu francais (olivier florens) qui finance lui meme un reportage sur ce qui se passe ici. Ils nous ont raconter avoir ete dans le no man s land proche de la centrale ou le taux de radiation atteind des sommets. Des fermiers ont tout abandonne labas en moins d une heure, des betes sont mortes de faim, j ai du des photos c est horrible. Des gens ont ete abandonne aussi suite au tsunami, personne ne voulait aller les aider de peur des radiations….je vous laisse imaginer. Un fermier japonais tres remonter disait au megaphone qu il fallait mieux prevenir que guerir mais qu on ne guerissait pas du nucleaire, on en meurt rien a faire…. J ai entendu plein de temoignage dont celui de Yasmine, juste apres la catastrophe, c est juste l apocalypse et le gouvernement ne fait rien pour aider, bien au contraire, ils ferment les autoroutes et rationne l essence pour empecher les gens de partir alors que le nuage nucleaire etait juste au dessus d eux…bref je pourrais ecrire pendant des heures. La centrale n est apparement pas stabiliser, une piscine de refroidissement peut s ecrouler sur le reacteur numero 4 en cas de gros tremblement, rien de rassurant. En tout cas je vais rentrer plus tot que prevu, dans 3 semaines je pense, mon voyage a vraiment prit un virage inattendu, ils sont vraiment dans la merde ici, c est dur de prendre conscience que des choses comme ca sont possibles….
    Bon allez je vous embrasse, je vais mettre des photos sur fesse book. Je quitte la zone contaminer (ou on est c est vraiment leger) tres bientot donc pas de soucis a se faire, je vous embrasse.
    hasta proxima !!!

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