Le piège du «principe d’innovation»
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Communiqué  à la presse de Michèle Rivasi
– Mardi 11 décembre 2018 –

Un concept dangereux
prôné par les « industries toxiques »

Depuis 2013, le principe d’innovation a fait son chemin au sein de la Commission européenne, grâce à de nombreux événements, courriers et courriels de groupes de pression (lobbies). Il a fait sa première apparition dans un document de travail de la DG Recherche en 2015 et il est aujourd’hui dans le projet de règlement Horizon Europe qui sera voté ce mercredi 12 décembre par le Parlement européen.

Le « principe d’innovation » peut paraitre innocent et comme ayant une base légale. Mais ce n’est pas le cas. Ce « principe d’innovation » est une invention d’industries polluantes et il n’a rien avoir avec d’autres principes légaux du Traité de l’Union européenne, comme le principe de précaution ou le principe de polleur-payeur.

Ce « principe » est le produit du European Risk Forum (ERF)[1], une plate-forme de lobbying pour des sociétés de produits chimiques, de tabac et de combustibles fossiles – des industries à risque, qui sont invariablement soumises à des réglementations sanitaires et environnementales. Le principal intérêt commun de ces industries polluantes est de maintenir leurs produits sur le marché avec le moins de restrictions et de réglementations possibles. En utilisant ce «principe», ces industries veillent à ce que «chaque fois qu’une législation est à l’étude, son impact sur l’innovation devrait être évalué et pris en compte»[2].

Ce « principe », s’il était appliqué, signifierait que chaque projet de texte de la Commission serait vérifié préalablement pour éviter toute mesure ayant un impact négatif sur « l’innovation » avant même que ces projets ne soient présentés au colégislateur. C’est précisément ce raisonnement qui a conduit la Commission à autant retarder la définition des perturbateurs endocriniens par exemple (elle a demandé une analyse d’impact sur les industries avant de publier la définition).

Ce concept est une attaque contre le principe de précaution qui nuit manifestement aux profits de ces industries polluantes et dangereuses. Ils veulent utiliser ce principe pour saper les lois de l’UE sur les produits chimiques, les nouveaux aliments, les pesticides, les nano-produits et les produits pharmaceutiques, ainsi que les principes juridiques de protection de l’environnement et de la santé humaine inscrits dans le traité de l’Union européenne.

Le groupe des Verts a déposé des amendements visant à supprimer les références à ce « principe d’innovation ». Le vote sera serré mais nous continuons à maintenir la pression et espérons que cette référence au principe d’innovation sera annulée ce mercredi 12 décembre.

Le système actuel d’évaluation et d’autorisation des pesticides par l’UE a été dénoncé comme insuffisamment protecteur de la santé humaine et de l’environnement par la société civile. un tel concept ne peut être adopté dans les textes européens. Écoutons les 1 400 000 signataires de l’ICE Stop Glyphosate et innovons, oui, mais pour une innovation juste qui respecte notre santé, notre environnement et l’avenir des générations futures.

Michèle RIVASI (députée européenne EELV, normalienne et agrégée en biologie, co-initiatrice de la Marche Vérité et Justice pour la santé environnementale)

[1] http://www.riskforum.eu/

https://esharp.eu/debates/innovation/the-innovation-principle

Contact presse : Sébastien Barles 06 75 00 63 31

Lire également la tribune de Michèle Rivasi sur le site de Reporterre

Une réflexion au sujet de “Le piège du «principe d’innovation»

  1. Bonjour, il y a une nouvelle attaque : le 25 juillet dernier, la Cour de Justice de l’Union européenne rendait une décision historique en affirmant que les nouvelles techniques de modification génétique donnent des OGM et que la législation en vigueur doit s’appliquer. Aussitôt, une offensive généralisée était lancée par les partisans des biotechnologies modernes qui plus que jamais souhaitent échapper à une législation européenne qui ne leur convient plus. Est-ce que les partisans de modification par mutagénèse font appel à ce principe « d’innovation » ?

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